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Violences conjugales : comment agir ?

8 juin 2020

La violence conjugale est un problème de santé publique grave et d’ampleur : elle concerne principalement des femmes. En 2018, 88% des victimes de violences sont des femmes, 213000 ont déclaré avoir été victimes de violences dans leur couple et seulement 20% ont déclaré avoir déposé plainte, cette même année ont a eu en matière d’homicide 149 morts violentes au sein du couple dont 121 femmes, ainsi que 21 enfants victimes dont 5 enfants tués en même temps que l’autre parents. (Synthèse Violences au sein du couple et violences sexuelles novembre 2019). La médiatisation de plusieurs féminicides au sein du couple a entrainé une action des pouvoirs publics au travers d’un grenelle contre les violences conjugales et ayant abouti à la loi n° 2019-1480 visant à agir contre les violences au sein de la famille publiée au Journal Officiel du 29 décembre 2019. 

Toutes les violences conjugales sont INTERDITES par la loi quelles proviennent d’un homme ou d’une femme : il peut s’agir de violences physiques, psychologiques (harcèlement moral, insultes, menaces), sexuelles ou économiques (maintien dans la dépendance, privation de ressource). Il y a violence conjugale lorsque la victime et l’auteur sont ou ont été dans une relation sentimentale, peu important qu’il soit marié, concubins, pacsé, petit ami ou ex conjoint. 

Les premiers réflexes à avoir si vous êtes victime de violences conjugales

  • Quitter le domicile conjugal avec vos enfants ; il peut y avoir un risque pour vous ou bien même vos enfants vous refugier auprès de votre famille, de vos amis ou bien vous rapprocher du Samu social (115) pour obtenir de l’aide. Des lieux d’accueil et d’hébergement pour les victimes sont prévus à cet effet.
  • Vous pouvez également vous rapprocher d’une association d’aides aux victimes, comme par exemple : Violence femmes Info : 3919 (ouvert du lundi au samedi de 9h à 19h, anonyme, appel non retracé sur les factures de téléphone).

Pour faire cesser cette violence, et que la victime soit protégée et le conjoint ou l’ex conjoint condamné, il faut saisir la justice, cette saisine peut se faire au travers de différents moyens :

  • Déposer une plainte à la gendarmerie ou au commissariat, afin que l’auteur des violences soit poursuivi en justice soit en vous adressant directement à un commissariat ou une gendarmerie (la réception de la plainte ne peut pas vous être refusée. Si tel est le cas, vous pouvez saisir en ligne l’inspection générale de la police ou gendarmerie nationale) soit en adressant directement une lettre au procureur de la république du tribunal judiciaire du domicile de l’auteur des violences (la lettre doit préciser l’état civil de la victime, les faits, le nom de l’auteur, éventuellement nom et adresse des témoins, description du préjudice, volonté de se constituer partie civile pour percevoir des dommages-intérêts et documents de preuves comme par exemple certificats médicaux, arrêt de travail, etc..

Avant de décider de l’opportunité d’une poursuite au pénal, le procureur de la république peut enjoindre au conjoint violent de résider hors de la résidence et de ne pas s’y approcher sur demande de la victime. (Art.41-1 6° C.proc.pénal).

  • Saisir le juge aux affaires familiales (JAF) du tribunal judiciaire de votre domicile pour obtenir en urgence une mesure de protection vous concernant (ex : interdisant l’auteur des violences de s’approcher de vous…), il peut délivrer en urgence une ordonnance de protection et même s’il n’y a pas eu de cohabitation avec le conjoint violent (Art. 515-9 C.civ), 
  • La délivrance de l’ordonnance de protection « n’est pas conditionnée à l’existence d’une plainte pénale préalable. Le JAF la délivre lorsqu’il estime qu’il existe des raisons sérieuses de considérer vraisemblables les faits de violences allégués et que ces violences mettent en danger la personne ou les enfants (Art. 515-11 C.civ). La preuve des violences en tant que telle n’a pas à être rapportée. Le JAF peut être saisi par requête (Formulaire requête : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R42412)
  • Vous pouvez vous rapprocher de votre protection juridique, d’une assistance sociale dans votre emploi, au sein de votre mairie ou bien une association d’aide aux victimes qui pourra vous aiguiller et vous accompagner dans vos démarches pour saisir la justice.
  • Le décret n° 2020-683 du 4 juin 2020 autorise déblocage anticipé de l’épargne salariale en cas de violences conjugales : (u deuxième alinéa de l’article L. 3323-5 sont les suivants : « 3° bis Les violences commises contre l’intéressé par son conjoint, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, ou son ancien conjoint, concubin ou partenaire :
    « a) Soit lorsqu’une ordonnance de protection est délivrée au profit de l’intéressé par le juge aux affaires familiales en application de l’article 515-9 du code civil ;
    « b) Soit lorsque les faits relèvent de l’article 132-80 du code pénal et donnent lieu à une alternative aux poursuites, à une composition pénale, à l’ouverture d’une information par le procureur de la République, à la saisine du tribunal correctionnel par le procureur de la République ou le juge d’instruction, à une mise en examen ou à une condamnation pénale, même non définitive.
  • Les sanctions pénales et civiles ont été renforcé par la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019, ,visant à agir contre les violences au sein de la famille.

Les dispositions principales de la loi, c’est tout d’abord une volonté de permettre le recours à l’ordonnance de protection. « Sa délivrance n’est pas conditionnée à l’existence d’une plainte pénale préalable », permet la délivrance d’une ordonnance « y compris lorsqu’il n’y a pas de cohabitation » et fixe un délai de six jours pour la délivrer à compter du moment où le juge fixe la date de l’audience.

Le dispositif anti-rapprochement avec la généralisation du bracelet anti-rapprochement

Le port du bracelet anti-rapprochement a aussi été facilité. Pour connaitre la position géographique de l’auteur des violences en temps réel, grâce à un bracelet, mais également la victime via un boîtier, est notamment en cas de placement sous contrôle judiciaire, emprisonnement assorti d’un sursis avec mise à l’épreuve et aménagement de peine. 

Des logements réservés aux victimes de violences conjugales, à titre expérimental, et pendant trois ans, la loi prévoit la possibilité de louer des logements à des organismes pour les sous-louer à titre temporaire à des personnes victimes de violences. Mais aussi, un dispositif d’accompagnement adapté pour faciliter le dépôt de garantie, les garanties locatives, les premiers mois de loyer et le relogement. 

La déchéance de l’autorité parentale en cas de « violences alléguées par l’un des parents sur l’autre parent ou sur l’enfant », et on s’attaque aux pensions de réversion. Mais la filiation persiste et les enfants sont considéré comme des victimes.

Dans les cas les plus graves, le procureur de la république peut également remettre à la victime un téléphone « grave danger » qui lui permet, lorsque l’auteur des violences n’a pas encore été arrêté ou jugé, de contacter directement une plateforme spécialisée en cas de danger. Le cas échéant, la plateforme alertera les services de police et la victime pourra être géolocalisée. La loi autorise notamment l’attribution du téléphone en cas d’urgence, mais sans nécessairement attendre une décision judiciaire.

Les Sanctions pénales sont aggravées

Les violences conjugales ayant entrainé une ITT < ou égal à 8 jours ou n’ayant pas entrainé d’ITT sont passibles de 3 ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende. Si les violences sont fréquentes, elles peuvent être qualifiée de violences habituelles ce qui augmentera la peine à 5 ans de prison et 75.000 euros d’amende. (Art. 222-13 et 222-14 C.pénal)

Les violences ayant entrainé une ITT > 8 jours sont passibles de 5 ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende. Si les violences sont fréquentes, elles peuvent être qualifiée de violences habituelles ce qui augmentera la peine à 10 ans de prison et 150.000 d’amende. (Art. 222-11, 222-12 et 222-14 C.pénal)

Si les violences ont entrainé la mort sans intention de la donner, la peine est de 20 ans si la mort a été causée par un seul cas de violences ou 30 ans en cas de violences répétées. (Art. 222-7 et 222-8 c.pénal)
En cas de meurtre, assassinat ou tentative, la peine encourue est la perpétuité.

En cas d’harcèlement moral au sein d’un couple, si les faits ont entrainé une ITT < ou égale à 8 jours ou aucune ITT, la peine passible est de 3 ans et 45.000euros d’amende.  (Art. 222-14, 222-16 et 222-33-2 à 222-33-2-2 c.pénal)

En cas de viol au sein d’un couple, la peine maximale est de 20 ans de prison. (Art. 222-23 à 222-26 c.pénal). En cas d’agression sexuelle autre que le viol, les peines sont de 7 ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende (Art. 222-22 et 222-22-2 c.pénal ; Art. 222-27 à 222-31 c.pénal).

Pour obtenir des dommages et intérêts, la victime doit se constituer partie civile dans le procès pénal.

Obligations des tiers face aux violences conjugales

Les médecins qui, lors d’un rendez-vous, constatent des signes de violences conjugales doivent inciter la victime à déposer plainte mais ne peuvent faire un signalement auprès des autorités compétentes qu’avec l’accord de la victime sauf si elle est dans un état de vulnérabilité (minorité, état physique ou psychique vulnérable). Le médecin doit mettre en œuvre tous les moyens adéquats pour protéger la victime (Art. R.4122-44 code de la santé publique).

S’il n’existe pas à proprement parler de contrainte légale concernant une obligation de l’employeur face aux violences conjugales, la responsabilité de l’employeur peut être engagée s’il ne prend pas des mesures pour se conformer à son obligation de sécurité vis-à-vis de ses salariés (ex, employé qui se fait harceler, menacer pendant ses horaires ou dont l’auteur des violences l’attend en bas de l’entreprise). En tout état de cause, votre employeur doit vous orienter vers des services d’aide compétents en la matière (ex, assistante sociale).

Concernant les tiers, notamment les voisins et l’entourage, l’inaction de ceux-ci peuvent être constitutifs de non-assistance à personne en danger et donc leur responsabilité pénale peut être engagé (Art. 223-6 c.pénal).

Contacts 

DANS L’URGENCE, contacter :

  • La police :  17 ou 112 (appel téléphonique) / o 114 (par SMS si vous ne pouvez pas parler) 
  • https://www.service-public.fr/cmi  (par chat)
  • Le SAMU : 15 (appel téléphonique)
  • Le SAMU SOCIAL : 115 (appel téléphonique pour un hébergement d’urgence)

Vous pouvez faire constater vos blessures directement à l’hôpital, chez un médecin ou une sage-femme ; ce qui sera utile en cas de dépôt de plainte.

Vous avez la possibilité d’obtenir une aide et écoute via les numéros et liens suivants : 

http://www.presse.justice.gouv.fr/communiques-de-presse-10095/rapport-de-ligj-sur-les-homicides-conjugaux-32781.html