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Trouble anormal du voisinage

15 mai 2020

« La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres » : le propriétaire ne possède pas un droit absolu de tout faire sur sa propriété. 
Le droit de propriété, tel qu’il est défini dans l’article 544 du Code civil, n’est donc pas un droit absolu puisqu’il est limité par les relations de voisinage. Que l’on soit voisin contigu ou à proximité, chacun d’entre nous doit adopter un comportement adapté pour ne pas causer à autrui un trouble anomal de voisinage.
La jurisprudence est alors venue encadrer les contours de cette notion dans un arrêt en date du 4 février 1971 : « Nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ou encore excédant les inconvénients normaux du voisinage ». 

Les conditions du trouble anormal de voisinage 

Pour que le trouble du voisinage soit constitué, il est nécessaire de constater un trouble anormal s’inscrivant dans un rapport de voisinage. Celui-ci doit causer un préjudice à la personne qui l’invoque. 

I – Un trouble : 

  • bruit de voisinage lié au comportement : ce sont généralement des bruits générés par le comportement de l’homme mais il peut aussi s’agir d’un animal. 
    → outils de bricolage et de jardinage, instrument de musique, fêtes familiales, travaux, aboiements… 
  • nuisances olfactives : certaines odeurs peuvent être considérées comme un trouble anormal de voisinage. 
    → barbecue, élevage porcin, émanation de fumier, déchets entreposés, déjection animale, odeur de cuisine d’un restaurant … 
  • nuisances visuelles : cela peut être assimilée à une pollution visuelle ou une modification dégradante d’un paysage. 
    → diminution d’ensoleillement, construction d’un mur, encombrants stockés dans un jardin…

II. L’anormalité

L’anormalité selon la Cour de cassation se caractérise par un dommage qui excède la mesure habituelle inhérente au voisinage (Civ. 3ème, 24 octobre 1990). Le principe est que l’appréciation du caractère anormal du trouble relève du pouvoir souverain des juges du fond. 
On peut retenir plusieurs critères : répétitif, intensif ou qui dure dans le temps.

 III – Un rapport de voisinage

Le rapport de voisinage ne s’arrête pas aux propriétaires contigus ou mitoyens, il peut s’agir d’un voisin à proximité à condition qu’il soit établi que ce dernier est directement à l’origine du trouble. Il peut s’agir d’un propriétaire, d’un occupant, d’un entrepreneur, etc.

Un exploitant poursuivi pour troubles anormaux de voisinage peut invoquer l’antériorité de son établissement et de ses activités afin de tenter de s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité. Pour pouvoir efficacement invoquer l’article L. 112-16 du Code de la construction et de l’habitation, l’activité, source de nuisances doit répondre à plusieurs conditions cumulatives :

  • être agricole, industrielle ou artisanale. Cependant, n’entrent pas dans le champ d’application de l’article L. 112-16, les dommages résultant de l’exercice d’une activité dans une copropriété ;
  • être antérieure à l’installation des plaignants ; 
  • respecter les dispositions législatives et règlementaires en vigueur ;
  • s’être poursuivie dans les mêmes conditions par rapport à la date retenue pour apprécier son antériorité. Le trouble anormal de voisinage peut être retenu malgré l’antériorité de l’installation de l’entreprise si les nuisances ont été aggravées. 

Les différents recours pour faire cesser le trouble 

  • Dans une démarche amiable, vous pouvez dans un premier temps vous entretenir avec l’auteur du trouble pour l’informer du désagrément.
  • Adresser à l’auteur une lettre recommandée avec accusé de réception pour lui faire part de la gêne occasionnée si celle-ci persiste. 
  • Recourir à une tierce personne pour régler le conflit : 
    → Le maire de votre commune : celui-ci détient des pouvoirs de police, il peut réprimer les atteintes à la tranquillité publique
    → Syndic de copropriété : il faut contacter le syndic qui est en charge de faire respecter le règlement de copropriété si vous habitez dans un immeuble en copropriété 
    → Le bailleur – propriétaire : vous pouvez directement contacter le bailleur qui lui, est responsable de son locataire. Le propriétaire doit entreprendre certaines démarches afin de faire cesser les nuisances à son locataire, faute de quoi, sa responsabilité pourra être engagée
    → Le conciliateur de justice : une tierce personne peut intervenir pour tenter de trouver un accord entre les parties. Il va alors dresser un constat d’accord dans lequel chacune des parties s’engage l’une envers l’autre.
  • Faire appel à un huissier : le constat d’huissier va permettre d’identifier et saisir une nuisance à un moment précis. Ce constat d’huissier sera utile en cas de procédure judiciaire. 
  • Porter plainte si tapage nocturne et tapage injurieux troublant la tranquillité d’autrui : Lorsque le bruit est commis entre 22h et 7h du matin, l’infraction pour tapage nocturne est présumée sans que ce bruit soit répétitif, intensif ou qu’il dure dans le temps (art. R623-2 du Code pénal).
    Vous pouvez également porter plainte pour le tapage diurne afin de faire constater les faits si le trouble est intense, long et/ ou répété. 
  • Saisir le tribunal judiciaire pour obtenir réparation du préjudice subi et faire cesser le trouble.